Portrait de pharmacien d’officine: Souad Naimi, auteure de l’abrégé sur les préparations, édition 2021
Souad Naimi est pharmacienne d’officine, diplômée de la faculté d’Alger en 1996. Elle débute sa carrière comme directrice technique puis en 2000 elle opte pour l’officine et s’implique dans l’action humanitaire. Pour Souad Naimi, l’engagement pour le développement de la pharmacie et pour le bien être des patients, débute à titre personnel par une exigence de qualité au niveau de l’officine.
Si elle regrette le manque d’accompagnement des pharmaciens nouvellement installés, souvent livrés à eux même, elle souligne avoir bénéficié du précieux partage d’expérience clinique de sa sœur, interne en médecine (anamnèse, orientation diagnostic).
En 2011, son engagement pour la pharmacie prend le format numérique lorsqu’elle rejoint le réseau Pharmagroupe sur internet, une plateforme d’échange de compétences et de partages, où elle devient administrateur. C’est là qu’elle redouble son engagement en s’investissant dans l’élargissement de la pratique pharmaceutique (EPP) en lançant et animant les divers symposiums annuels.
Puis, sur une idée de sa consoeur Khalida Bensalem qui la met en contact avec d’autres officinaux, le premier forum du préparatoire algérien venait de naître. Vite opérationnel, le groupe a contribué en 2015 à l’organisation de l’atelier du préparatoire animé par Souad Naimi, lors du deuxième symposium à Chenoua. Souad Naimi aborde les contraintes rencontrées dans le préparatoire à travers le monde. Elle cite le difficile accès à certaines matières premières qui menace l’évolution du préparatoire, le problème d’approvisionnement en articles de conditionnement. Les produits de qualité aux exigences des normes codex et des bonnes pratiques du préparatoire, ne bénéficient malheureusement pas d’un circuit de distribution spécifique. La réglementation algérienne semble en avoir fait l’impasse.
Les seuls produits MP, proviennent des circuits de distribution servant le secteur de l’industrie pharmaceutique. Récemment, un importateur à l’Ouest du pays, s’est lancé dans cette activité et remet des certificats de conformité aux monographies de la pharmacopée européenne pour les produits livrés. Il faut rappeler qu’à l’époque du monopole de la distribution des produits pharmaceutiques, les entreprises publiques PHARM (ENAPHARM, ENCOPHARM, ENOPHARM), distribuaient les matières premières pour le préparatoire de très grande pureté, issues des grands laboratoires internationaux du secteur de la chimie (SIGMA , FLUKA, etc. ) et qui n’étaient pas forcément aux normes du codex.
Parmi les solutions à la problématique d’approvisionnement en matières premières, le SNAPO avait mis en place une cellule dédiée, et Souad Naimi avait été contactée par Nachida A., membre de cette cellule pour réfléchir aux solutions. C’est ainsi, qu’avec son équipe le collectif des pharmaciens préparateurs composée entre autre de Ali Foufou, Akila Saib, Hocine Benamara s’est renforcé. Grâce à la qualité de leur travail, le collectif s’est vu offrir chaque année par les organisateurs du SIPHAL (Le Salon International de la Pharmacie d’Alger), un stand ainsi qu’une inscription dans le programme des conférences avec démonstrations pratiques, qui ont été très suivies et très appréciées par les pharmaciens visiteurs du salon.
La pratique du réseautage a été très utile pour Souad, car elle permet de dépasser les frontières et de rejoindre d’autres groupes, comme le groupe européen (société scientifique des pharmaciens francophones) qui offre la possibilité de suivre les échanges forts intéressants et qui bénéficie de l’accompagnement de professeurs en pharmacie qui répondent aux questions des praticiens qui exposaient les difficultés rencontrées lors de certaines préparations. Souad Naimi revient sur le problème de disponibilité de matière première en Algérie, qui apparait crucial car il menace l’existence du préparatoire.
La pratique a beaucoup évolué à travers le monde et avec elle, la nature des MP, les excipients et les différents équipements qui doivent s’adapter aux pratiques du moment. A titre d’exemple, il nous faut acquérir un gélulier de l’étranger. Dans les références algériennes, Souad Naimi cite le formulaire national préfacé dans son édition de 1994 par le professeur Rachid Denine alors inspecteur général de la pharmacie, auteur avec I. Benkaidali, B. Benkadara, N. Djendi, H. M’Hamsadji et A. Smati. Certaines de ces formules ont été reprises dans l’ouvrage que vient de publier S.N.
Les divers FN possèdent des spécificités locales, comme par exemple l’huile de paraffine qui est remplacée par l’huile d’olive en Espagne qui en est un gros pays producteur. Pour l’Algérie, le FN gagnerait à intégrer l’huile de lentisque (zeit edhrow), un produit du terroir dont les vertus sont connues depuis des lustres. Aussi S.N. a intégré dans on ouvrage, une variante de la crème de Dalibour élaborée par Mehdi Merad, qui a remplacé l’huile de vaseline par l’huile de lentisque, dont les propriétés cicatrisantes sont connues depuis fort longtemps. Les résultats sont apparus plus satisfaisants que la formule originale.
La formation universitaire de base en pharmacie galénique, reste selon S.N. trop insuffisante et axée vers la partie théorique, au détriment des très précieux travaux pratiques pour une telle spécialité technique. Ce constat avait été fait alors qu’elle recevait une stagiaire en génie des procédés pharmaceutiques, une ingénieure qui maitrisait l’ensemble des opérations et des principes de la galénique qui constituait son cœur de métier. Quant à la formation continue, celle-ci est malheureusement inexistante, les pharmaciens doivent l’entretien de leur pratique grâce aux ressources puisées sur internet. Nos voisins marocains et tunisiens semblent être dans la même situation, Souad en explorant la toile, n’a pas trouvé de publications sur le sujet. Souad rapporte du côté des prescripteurs, que l’on retrouve principalement les dermatologues, puis les généralistes pour les préparations à usage externe.
Pour les formes orales, les pédiatres et parfois les cardiologues en expriment le besoin. Ainsi dans son abrégé figure parmi ses formules, la levothyroxine à 25µg/ml en suspension. Quant aux vétérinaires, leurs ordonnances n’apparaissent qu’occasionnellement surtout dans les zones rurales. Les équipements à l’échelle d’une officine qui produit de petits lots, restent cependant accessibles dans notre pays. Cela se complique lorsqu’il s’agit de produire des lots plus importants. L’origine de l’abrégé de Souad Naimi, vient d’une part du travail initié lors du symposium Pharmagroupe en 2015, avec l’atelier préparatoire, qui fit apparaitre dans ses recommandations, la nécessité de réaliser un recueil des diverses formulations adaptées à notre pays.
D’autre part, l’encouragement de ses collègues du collectif du préparatoire, à poursuivre l’important travail qu’elle venait de réaliser, a été important. Ce fut pour Souad Naimi un second déclic pour poursuivre le travail et aller au bout de son rêve, celui de rédiger son propre ouvrage autour de l’art du préparatoire, face à l’absence d’ouvrages de référence actualisés sur le marché national. Cet ouvrage destiné autant aux officinaux qu’aux hospitaliers aux prescripteurs et aux étudiants, a consisté en la collecte de préparations officinales référencées, à en faire le tri pour retenir les formules validées dans un premier temps et réalisables en Algérie, puis envisager par la suite la mise en avant du savoir faire des pharmaciens préparateurs algériens.
On y retrouve des formules de Mehdi Merad, Akila Saib et Hamdi Hani qui ont accepté de partagé leurs formules. Les principales références utilisées ont été le FTM, le formulaire national algérien, les pharmacopées européenne et américaine (USP & N F), les formulaire espagnol, français, britannique (British Pharmaceutical Codex) et italien, l’ouvrage préparations dermatologiques magistrales en suisse de Deplazes C. ou le pediatric drug formulation de Milap C. Nahata. L’abrégé est structuré en 4 parties, débutant sur des généralités et les bonnes pratiques avec le cadre réglementaire accompagné de ses commentaires et enrichi d’explications. Puis sont abordées en rappel les diverses opérations réalisées dans le cadre de la galénique (pesée, qualité de l’eau, mouillage de l’alcool, etc.). Suivent les formulations des excipients préparés à l’avance, les préparations officinales à prescription facultative (crèmes, pommades, pâtes, solutions, gels, poudres, formes sèches et humides, etc.). S.N. poursuit avec les préparations officinales à prescription obligatoire (pmo) partie dans laquelle on retrouve le déconditionnement sec (préparation de gélules) et humide (mise en suspension).
Un seul plan conventionnel a été suivi pour toutes les formules à savoir: la composition qualitative et quantitative, le mode opératoire détaillé, le conditionnement et les conditions de conservation, la durée de validité, l’usage thérapeutique et la posologie et enfin la source documentaire d’où la formule a été extraite. Les formules pour lesquelles des variantes existent, apparaissent en remarque avec la modification apportée aux côtés de la formule originale, tout comme les changements dans le protocole qui présentent une pertinence.
L’ouvrage reçoit déjà un accueil très favorable de la corporation et peut devenir l’ouvrage pharmaceutique de l’année. Il est publié aux éditions LOUMI, spécialisées dans les publications médicales, disponible au prix de 1.500 DA à la librairie des Editions LOUMI, au 74, rue Hassiba Ben Bouali (Alger) 0770 88 14 50.
