Portrait d’actionnaire, Souad Zidani, une vision moderne des groupements à travers les services

Par Abdellatif Keddad

En volleyeuse avertie, c’est vers le sport qu’était tracée la route universitaire de Souad. Sensible aux questions de santé et le bac acquis en 1986 à Constantine, elle postule à la fois pour le département biomédical et l’institut du sport d’Alger. C’est finalement la filière santé qui lui ouvre en premier les portes. A l’université, elle est soucieuse des conditions d’études qui se détérioraient.

Souad s’implique alors en qualité de déléguée de promo avec ses camarades dans la vie estudiantine pour œuvrer à la mise en place de solutions pour une meilleure qualité d’enseignement. En fin de cursus, c’est le non accès
aux différents services terrains de stage pour tous les étudiants, qui fut le point crucial des revendications. A cette époque, les étudiants étaient exigeants sur la qualité de l’enseignement, au point qu’une longue grève avait été initiée pour appuyer les demandes du moment. Ce mouvement fut soldé par une victoire et les étudiants s’étaient engagés à récupérer le retard en organisant les heures supplémentaires d’enseignement.

Le diplôme en poche, Souad rejoint l’industrie et devient superviseur de laboratoires internationaux. Ce passage très précieux, lui aura
permis de renforcer ses connaissances sur les médicaments, sur
le plan clinique et sur celui de la pharmacovigilance.

Elle finit par opter pour le secteur libéral et s’installe à Constantine comme officinale. Alors que les pouvoirs publics venaient d’ouvrir le marché économique, elle a soutenu le projet porté par Mustapha Amrani,
pharmacien, pour le rachat d’un groupe public de distribution
des médicaments, en regrettant qu’il n’ait pas eu l’écho favorable des officinaux, bien qu’il présentait toutes les garanties de réussite. Au
lendemain de la création du syndicat des officinaux, le SNAPO, Souad bénéficie de la confiance de ses collègues, qui l’élisent première présidente du bureau de Constantine. Si l’écart générationnel fut important, elle se
souvient n’avoir rencontré aucune difficulté avec ses aînés, bien au contraire, une véritable collaboration s’était installée ouvrant la
porte à un « militantisme trans générationnel porté par la foi et l’ardeur pour accompagner la réalisation du bien être de tous ». Souad obtient de nouveau la confiance des pharmaciens qui l’élisent au conseil de l’ordre.

Elle fut présidente de la commission déontologie, ce
qui a été une expérience riche qui lui a permis d’être à l’écoute de ses collègues. Elle a participé à la mise en place de diverses formations continues et à l’organisation des gardes. Souad a eu à traiter des questions d’éthique et de concurrence déloyale (affichage non réglementaire, pratiques commerciales non conformes, non respect des gardes etc.)
« Nous expliquions à nos collègues qu’on ne peut pas se faire respecter si on ne respecte pas la déontologie, un pharmacien est porteur de valeurs éthiques ». Il y avait une concurrence déloyale contre laquelle il fallait lutter, celle des agences publiques qui dispensaient des médicaments en absence de pharmacien, constituant un exercice illégal contre lequel il
fallait lutter « nous devions résister et riposter ».

La non révision des marges commerciales, est restée une question cruciale pour Souad, car « les revendications n’aboutissaient pas et la chute économique été lourde de conséquences ». Pour elle, cette question
reste fondamentale pour la viabilité de la pharmacie.

Dans ce contexte, la solution économique de constituer un groupement, a été adoptée par Souad. Elle rejoint alors Pharma Invest à ses débuts. Sa conception du groupement de pharmaciens, dépasse le simple stade de la distribution. Elle imagine l’entité avec la réalisation de services pour les
officinaux, à l’image de ce que font les sociétés étrangères qui ont le même
statut. Parmi ces services, la mise en place par le groupement pour ses pharmacies adhérentes, de location d’équipements médicaux (matelas anti escarres, dispositifs médicaux, lits médicalisés, aide pour les personnes
âgées, l’hospitalisation à domicile—HAD, respirateur, etc.). « Ces équipements sont couteux pour les patients pour une durée d’utilisation brève, d’où l’intérêt de les louer pour en permettre l’accès au plus grand nombre, en créant un service en officine via le groupement Pharma Invest».

Souad est par ailleurs persuadée que l’évolution du mode de rémunération du pharmacien, passant d’un modèle strictement commercial à un modèle où des prestations intellectuelles sont intégrées, contribuera à réduire les pratiques anti-déontologiques. Cela permettra aussi de mieux asseoir la dignité des pharmaciens laquelle s’est effacée sous le modèle commercial imposé.

La perte du pouvoir d’achat des pharmaciens a développé les dérives constatées. Par ailleurs, Souad estime qu’il y trop de molécules génériquées ce qui impacte négativement la qualité des médicaments et la gestion, car c’est un choix budgétivore. Pour elle, il faut une politique du médicament avec une bonne planification qui priorise les meilleures molécules.
La rémunération sur l’acte pharmaceutique prévue dans la nouvelle loi santé 2018, est un projet excellent, car c’est la seule manière de fédérer les pharmaciens vers des pratiques éthiques. Etre plus proche du malade, à son écoute.

Les problèmes rencontrés dans notre système actuel ont pour origine selon elle, des dysfonctionnements dans le circuit du médicament de la production importation à la distribution qui sont des secteurs qu’il faudra assainir. Il s’agit d’améliorer l’éthique de la profession avec une revendication de meilleurs revenus.

Souad Zidani nous laisse le mot de la fin suivant «Nous devons nous respecter, et respecter ce noble métier qu’est la pharmacie qu’il faut préserver. »