Portrait de pharmacien, Rabie ZIAR membre du CA : ‘De la commune de Khelif au Conseil d’Administration, un parcours original’

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Portrait de pharmacien, Rabie ZIAR membre du CA : ‘De la commune de Khelif au Conseil d’Administration, un parcours original’


Par Abdellatif KEDDAD in Le Bulletin du Pharmacien

Rabie ZIAR, pharmacien actionnaire et membre du Conseil d’Administration, est installé à Khelil une bourgade de près de 40 000 habitants dans la wilaya de Bordj Bou Arreridj, située entre les monts des Bibans au nord, et la chaîne du Hodna au Sud. Il a rejoint Pharma Invest en 2001, dans la lancée d’un groupe d’amis de l’université porteurs du projet innovant, parmi lesquels on retrouve Mehdi Chehili et Hichem Zouak. Pour lui, ce projet était porteur d’un modèle idéal non seulement pour l’officinal, mais aussi pour les pouvoirs publics qui ont l’opportunité de préserver la chaîne du médicament entre les mains des professionnels.


Avec le temps, il a intégré le Conseil d’Administration pour contribuer au développement de l’entreprise tout en s’attaquant aux enjeux du secteur et en relevant les défis. Pour cela, Rabie ajoute qu’il est nécessaire d’acquérir les compétences managériales, lesquelles, ajoutées aux compétences scientifiques des pharmaciens, permettront de mieux asseoir les attentes des actionnaires et des clients au service de la santé publique. L’entreprise a déjà mis en place des outils qui accompagnent le pharmacien dans sa gestion quotidienne des achats, de manière rationnelle avec une vision futuriste. Pour lui, le passage au CA est une expérience enrichissante qui, de plus, fait aborder la gestion de l’officine avec un angle différent.
Rabie Ziar s’est installé à Khelil, la cité qui dispose d’un riche patrimoine dans lequel on retrouve un temple datant du IIIe siècle, les ruines de Kherbet-Guidra une ancienne basilique romaine située en dehors du rempart, probablement située à la lisière de la ville romaine, sans doute construite sur une église plus ancienne, comme cela arrivait souvent, avec la main d’œuvre numide locale.


Rabie Ziar a grandi à Ain Fakroun (W. Oum El Bouaghi), la Vallée des Rois (Numides). Son nom ferait référence à une source où se trouvait une immense mare dans laquelle vivaient un nombre prodigieux de tortues.
A Ain Fakroun, existe une cité antique berbère avec un fort, des tombeaux et l’huilerie du Djebel Loussalit, qui vient d’être classée au patrimoine archéologique national, un trésor de plus dans notre riche patrimoine. Rabie y suit une scolarité ordinaire jusqu’au baccalauréat scientifique qu’il obtient en 1995. Il insiste sur le rôle majeur des parents qui ont eu un impact fort positif sur la réussite de leurs enfants. Les mettre sur les rails et les encadrer pour un parcours sans faute, telle a été leur mission, alors qu’ils étaient conscients de la nécessité d’obtenir un diplôme pour avoir une place confortable dans la société, eux qui avaient été privés d’accès au système éducatif par le système colonial.


Ses parents, des gens humbles avec des capacités financières limitées, disparus depuis, ont ainsi eu leur revanche sur le système colonial, car ils ont permis à leurs enfants de réussir leurs différents parcours universitaires, dont un est devenu docteur en physique nucléaire. A ce jour, Rabie se souvient des pieuses invocations faites par sa défunte mère, avec beaucoup de tendresse, comme d’un bouclier Divin : « Elle était notre carburant ».


Pratiquant le karaté, un art martial qui nécessite une grande discipline, sa passion l’y fait évoluer avec beaucoup de rigueur jusqu’au grade de la ceinture noire. Il ne reste pas en retrait des autres pratiques sportives, participant aux matchs de football avec ses jeunes camarades et le peu de moyens mis à leur disposition. Fidèle aux recommandations pour une bonne santé, auxquelles s’ajoute la recherche du plaisir sportif, il entretient ses foulées de footing sur les stades, ajoutant la pratique de la natation qu’il fait en dilettante.


Université
Bien que Rabie Ziar ait été un matheux aguerri, son parcours universitaire s’est orienté vers les filières biomédicales sur les conseils de son frère aîné, le physicien. Ainsi, attiré par les fioles et les pipettes, c’est vers la pharmacie qu’il poursuivra son cursus à l’université de Constantine, sur les pas d’Ibn Sina le Shaykh al-Rais, un personnage qui le fascinait, l’auteur des Canons de la Médecine, une référence fondamentale durant des siècles aussi bien en Orient qu’en Occident. Celui-ci avait apporté une synthèse remarquable des connaissances médicales de son époque, rassemblant et développant les savoirs grecs, arabes et persans.


Dans la ville des ponts suspendus, Rabie souligne l’excellente qualité de l’enseignement qu’il a suivi à l’université de Constantine, avec des enseignants d’une grande compétence. Son stage d’internat a été réalisé à l’hôpital de Ain Fakroun dans l’ensemble des services de biologie. Un accueil respectueux lui avait été réservé, comme cela est souvent le cas dans les petites communes à l’intérieur du pays, où les blouses blanches ont beaucoup de considération.


Parcours professionnel
Il obtiendra son diplôme de pharmacien en 2001 et, après une longue prospection à travers les wilayas, la carte pharmaceutique commençant à être saturée, il choisira de s’installer à Khelil dans la wilaya de BBA, sur proposition d’un de ses camarades. Il ne regrettera jamais ce choix, où dès le premier jour, l’accueil par la population fut chaleureux et la région lui est apparue agréable. Il a pu ainsi facilement s’intégrer dans cette société, engendrant une forte motivation pour fournir les meilleurs soins pharmaceutiques à ses patients. Il a rendu plusieurs visites de courtoisie aux prescripteurs avec lesquels se sont tissés des liens professionnels de grande qualité, eux qui souhaitaient connaître l’état des disponibilités des médicaments, ou les alternatives thérapeutiques existantes.


Autant les médecins du secteur public que du secteur privé, trouvaient en Rabie Ziar, un interlocuteur fiable et compétent, en mesure de répondre aux questions relatives aux produits pharmaceutiques. Il s’est ainsi retrouvé initiateur de la nécessaire communication prescripteurs – dispensateurs. Face au manque de personnel et collaborateurs du pharmacien, il a relevé le challenge en prenant en charge la formation à la carte de son équipe officinale. Son officine est également un terrain de stage pour les étudiants souvent affectés par le département de pharmacie de Sétif. Il n’hésite pas à mettre à leur service l’ensemble des savoirs de la profession, en leur inculquant les nécessaires valeurs éthiques et déontologiques.


S’ils furent deux pharmacies dans la commune de Khelil lors de son installation, vingt années plus tard, les rangs seront renforcés avec dix nouvelles ouvertures. Afin d’harmoniser son exercice avec les meilleures pratiques, Rabie Ziar s’est intéressé aux questions sur l’éthique religieuse, notamment celles en lien avec l’exercice de la profession, en plus des règles déontologiques. Il s’est penché sur la question de la Zakat du pharmacien et la manière de l’établir, un sujet apparu complexe, tant les éléments sont nombreux. Il a comme souhait, la rédaction d’un guide sur la détermination de la Zakat à l’attention des officinaux, conscient qu’il est nécessaire d’avoir les avis des juristes sur cette question délicate et ô combien importante.
Comme de nombreux pharmaciens, Rabie Ziar s’est investi dans l’action humanitaire, action qu’il préfère maintenir dans la discrétion. Bien que l’entraide dans les régions de l’intérieur du pays soit présente, les petites localités, voire les dechra les plus reculées, sont plus exposées à la pauvreté, souvent du fait des sécheresses successives qui empêchaient ces habitants de vivre du travail de la terre. Les besoins élémentaires ne sont pas toujours accessibles aux populations, comme les soins, l’habillement, les fournitures scolaires.


Sa vision de la pharmacie, du groupement
Malgré le fait que ses jeunes confrères, nouvellement installés, viennent le solliciter ou lui demander conseil, il n’hésite pas à les accompagner dans leurs démarches et constate que la pharmacie a beaucoup évolué, tant sur le plan de la gestion que sur celui des pratiques commerciales. Les tensions sur les disponibilités des médicaments, n’ont pas facilité la tâche, introduisant des comportements éthiquement limites. La relation avec les patients en a été impactée. Il cite le rôle fondamental du Conseil de l’Ordre et des règles de déontologie qui doivent non seulement être respectées, mais actualisées et adaptées au contexte : il est important d’appliquer la réglementation en vigueur, car la pharmacie est un métier noble.
Il rejoint l’hypothèse que le modèle économique actuel de l’officine, n’est plus en adéquation avec la mission de service public de la pharmacie. L’intégration de services liés à la santé, comme précisé dans la loi santé 2018, permettra de valoriser les compétences du pharmacien tout en améliorant la qualité des soins. Pour Rabie, le pharmacien est un professionnel de la santé et pas uniquement un gestionnaire de médicament. Il ajoute que l’intégration de services rémunérés fera revivre la pharmacie.

Rabie Ziar invite ses collègues pharmaciens à préserver l’éthique professionnelle pour maintenir le statut de professionnel de la santé au service du patient et contribuer à la valorisation de ce métier noble, alors qu’une révolution du numérique s’est mise en place.

Abdellatif Keddad
Abdellatif Keddad
Journaliste médical
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